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La Princesse et la Rose : Chapitre VI
La nuit était tombée. Maximilien avait allumé un feu pour qu’ils n’aient pas trop froid durant la nuit, mais aussi pour faire cuire un animal qui n’aurait pas dû passer par la.
Pourquoi ne pas utiliser nos provisions, avait demandé Lisamélie.
-Autant utiliser les ressources naturelles que l’on trouve. Il faut garder nos provisions, car on ne sait pas si on pourra trouver à manger par la suite.
Le repas s’était avéré succulent et ils étaient désormais couché chacun sur une couverture, à même le sol. Le temps était clair aussi ils n’avaient pas jugé utile de monter la tente.
-Dormir à la belle étoile, j’en ai toujours rêvé, dit Lisamélie.
-Vous l’avez déjà fait, répondit Maximilien. Je vous ai vu.
-Dans la cour du château ça ne compte pas ! Ici c’est vraiment la nature ! La nature sauvage et indomptée! Vous ne trouvez pas?
-J’ai déjà eu mon quota de nuits à la belle étoile, répondit Maximilien, songeur.
Un silence s’installa rapidement alors que la Princesse regardait le jardinier.
-Vous allez me dire qui vous êtes réellement, Maximilien le jardinier ?
Il sourit.
-C’est vrai, je n’ai pas toujours été jardinier. La botanique n’a longtemps été qu’un hobby. Il y a bien longtemps, j’étais chevalier. J’ai commencé très jeune. J’étais excellent. Le meilleur peut être. J’ai combattu contre les hommes du roi Éric avant que la guerre ne soit terminée, à votre naissance.
-Pourquoi avoir quitté les rangs des chevaliers, questionna Lisamélie. Il en faut toujours ! Même si la guerre est finie, il y a la protection de la famille royale, et les divers problèmes du royaume !
C’est une histoire compliquée, et assez douloureuse, majesté. Mais sachez que je peux vous défendre. Et pas avec une tulipe.
Lisamélie fit la moue.
-Désolé, reprit-elle. Je ne voulais pas vous humilier.
-Ce n’est rien, mademoiselle. Vous avez grandie en me voyant jardinier. Et j’aime l’idée de me battre avec une tulipe comme seule arme! Il nous faut dormir maintenant, demain nous avons une longue route. Bonne nuit, Princesse.
-Bonne nuit, Maximilien.
La nuit se passa sans encombre et ils dormirent d’un sommeil profond. Sauf Maximilien, qui avait réveillé ses vieux réflexes de chevalier, et qui n’avait dormi que d’un œil, l’oreille tendue à l’affut du moindre danger.
Après un petit déjeuner rapide, ils chevauchèrent à nouveau le long de la falaise pour trouver un passage où descendre vers la vallée. Ils firent une pause vers midi pour se restaurer rapidement de quelques fruits trouvés dans un verger, puis repartirent, toujours dans la même direction. Vers le milieu de l’après-midi, le champ de tulipes d’or s’arrêta brusquement et la falaise se mit à descendre très lentement. Ils continuèrent dans cette direction. Quand le soleil se coucha, ils arrivèrent au lit de la rivière.
-Connaissez-vous cette rivière, demanda Lisamélie.
-C’est la rivière Fourbe, répondit le jardinier. Elle passe ici bien loin des terres de vos parents.
-Nous avons quittés le royaume ?
-Oui, un peu avant la fin du champ de tulipes. Nous sommes ici dans des terres inoccupées, trop proches de la zone dangereuse. À partir de maintenant il nous faudra être en permanence sur nos gardes. Le danger peut surgir de partout. D’autant que nous ignorons son origine.
La rivière semblait assez calme et Lisamélie s’en étonna.
-Pourquoi l’appeler la rivière Fourbe ?
-Elle semble calme mais elle naît plus à l’est, de deux rivières qui, dit-on, viennent de l’enfer.
-La ou se trouve le triple tumulte?
-Oui. Elle coule ensuite jusqu’aux terres du roi Mitre, plusieurs milliers de kilomètres à l’ouest. La-bas, elle se jette dans l’océan avec une force inouïe, non sans balayer régulièrement nombre d’habitations lorsque lui vient l’idée d’être en crue.
-Une rivière ne pense pas, Maximilien. Se sont les pluies qui provoquent les crues.
-Pas pour la rivière Fourbe. Personne n’a jamais réussi à prédire ses crues. En été, en hiver, elle arrivent sans prévenir. Ce soir, nous établirons notre campement un peu plus loin, je ne voudrais pas être emporté par une crue en dormant.
-C’est vous qui décidez pour ça, Maximilien !
Ils revinrent donc environ un kilomètre en arrière et établirent leur campement dans un petit bois. -
La Princesse et la Rose : Chapitre V
La journée passa rapidement et le soleil avait sérieusement entamé sa descente vers le sol quand Lisamélie revint sur un sujet qui la turlupinait.
-Dites moi, Maximilien. Vous me semblait bien au courant des fais d’armes de Valik.
-Sa réputation dépasse nos frontières, princesse, répondit Maximilien.
-J’ai une intuition, reprit la Princesse. Comme si vous et Mère me cachiez quelque chose.
Maximilien rougi.
-Vous n’êtes pas vraiment jardinier, n’est-ce pas?
Maximilien ne répondit pas. Ils venaient de franchir une colline et Maximilien fit arrêter son cheval à son sommet. Lisamélie s’arrêta également.
-Vous ne me répondez pas… J’ai donc raison! Moi qui croyais vous connaître ! Qui êtes-vous en vérité ?
Maximilien tendit son bras gauche droit devant lui et pointa du doigt l’horizon.
-Les falaises d’or, lâcha-t-il finalement.
Lisamélie suivi du regard la direction indiqué par Maximilien en tournant lentement la tête. Son regard s’illumina.
Droit devant eux, le soleil se couchait derrière une falaise, à environ trois kilomètres. La falaise était très large, plusieurs kilomètres de large. Elle brillait d’un jaune éclatant. Comme de l’or. Les reflets du soleil couchant apportait à la scène un puissance dramatique phénoménale. Lisamélie allait en pleurer tellement le spectacle était beau.
-Ce n’est pas vraiment de l’or n’est-ce pas, finit par dire la Princesse.
-Non majesté. C’est une variété de tulipes d’un jaune éclatant qui ne pousse qu’ici. Je suis déjà venu en cueillir pour certaines décorations particulières du château. Votre fête d’anniversaire, par exemple. Pour vos dix ans.
-Je me rappelle de ces tulipes. Elles m’avaient fascinées par leur teinte brillante.
-J’ai essayé d’en faire pousser dans les serres royales, mais elles ne prennent qu’ici. J’ignore pourquoi.
Ils se remirent en route et entrèrent dans le champ de tulipes avant que le soleil ne soit totalement couché.
-Vous avez une idée de la suite, demanda Lisamélie. Le triple tumulte?
-Maximilien réfléchit tout en regardant au loin, au-delà de la falaise. Le décor s’assombrissait de secondes en secondes, mais on distinguait encore des montagnes au loin, des champs, une rivière…
-J’avais un doute, reprit Maximilien, mais plus maintenant.
Il leva à nouveau la main gauche pour désigner quelque chose, au loin. Lisamélie suivit du regard la direction indiquée et vit ce qu’ils cherchaient. Au loin, reflétant la lumière rougeoyante du soleil couchant, deux rivières se rejoignaient violemment pour n’en former qu’une.
-Vous avez raison, lâcha finalement Lisamélie.
-Ressortons du champ, nous allons établir notre campement ici, dit Maximilien. Demain nous essaierons de trouver un chemin qui nous permette de descendre, afin de rejoindre le lit de la rivière. Nous la remonterons jusqu’à ce “triple tumulte”.
-Cette odyssée s’annonce bien, reprit Lisamélie.
-Pour l’instant oui. Mais c’est la suite du poème qui m’inquiète. Personne ne va jamais par là car c’est réputé trop dangereux.
-Trop dangereux ? Quels genres de dangers?
-On ne sait pas, repris Maximilien. Personne n’en est jamais revenu pour témoigner. -
La Princesse et la Rose : Chapitre IV
La Princesse et le jardinier étaient déjà sur leurs destriers, prêts à partir. De chaque côté des chevaux, de gros sacs de provisions pendaient lourdement.
-Je vous inquiétez pas, mère. Tout va bien se passer.
La reine se dirigea vers Maximilien.
-Voici donc venu le jour où vous réglez votre dette, Maximilien, chuchota la Reine.
L’homme hocha la tête d’un air grave.
-Protégez la Princesse, repris la Reine à voix haute. Au péril de votre vie s’il le faut.
-Oui Majesté, répondit-il.
-Mère, reprit Lisamélie. Je n’ai nullement besoin d’être protégée. Il est jardinier, pas chevalier. Je ne le vois pas attaquer les ennemis à coup de tulipes ! Sans vous offenser, Maximilien.
L’homme baissa les yeux.
-Si Maximilien vient avec moi, c’est pour ses qualités de botaniste. Nous devons partir maintenant, mère. Le temps nous est compté pour sauver père.
Soudainement, un bruit de sabot de cheval au galop se fit entendre. C’était Soren, le fils du roi Éric, qui chevauchait rapidement en leur direction. Il s’arrêta près d’eux, descendit de sa monture, puis se présenta à la reine en faisant une révérence.
-Majesté, dit-il. Permettez moi d’accompagner la princesse dans ce périple.
Lisamélie descendit de son cheval pour le retrouver.
-Hélas, mon ami, dit-elle. La prophétie parle d’un seul et unique compagnon pour accompagner. Et Maximilien est le seul à pouvoir me conduire jusque la rose des âmes.
Soren baissa les yeux.
-J’aurais tant voulu être cette personne qui vous protégera, princesse.
Lisamélie souri.
-Je le sais, Soren. Nous avons grandi ensemble comme des cousins et nous avons vécus mille aventures merveilleuses. Mais aujourd’hui c’est avec Maximilien que je dois partir. Mais dès que je serais de retour, nul doute que vous pourrez à nouveau veiller sur moi.
Elle déposa un baiser sur sa joue et il rougit. Elle remonta sur son cheval.
-Vous allez me manquer princesse, dit Soren.
Elle le fixa dans les yeux.
-Vous aussi, prince Soren.
Elle se retourna, secoua les rennes de son cheval, et celui-ci parti au galop, suivi de Maximilien.
Quand le tonnerre du bruit des chevaux fut dissipé, la reine s’approcha de Soren.
-Votre regard me rappelle celui de mon époux lorsque je l’ai rencontré. Pourquoi n’avouez-vous pas vos sentiments à Lisamélie ?
-Majesté, je ne me permettrais pas ! Jamais sans l’accord du Roi son père.
-Arrêtez vos protocoles… Je vois bien comment vous vous regardez tous les deux. Je sais ce que vous éprouvez sans l’avouer. Dîtes lui, dès qu’elle rentrera. Elle a besoin de l’entendre autant que vous de le dire.
-Bien Majesté, répondit Soren.
Il monta sur son cheval et retourna au pas chez lui, le cœur lourd.
-Vous savez où trouver ces falaises d’Or, Maximilien ?
-Oui, princesse, j’ai une petite idée. C’est assez loin, mais nous devrions y être avant le coucher du soleil.
-Vous êtes sûr de vous?
-J’ai une assez bonne idée des falaises d’or, puis du triple tumulte… pour le reste nous verrons bien.
-C’est déjà un bon début. Valik n’avais aucune idée de ce que cette énigme racontait.
-Valik est âgé et fatigué Altesse. De plus je pense qu’il s’en veut énormément de ne pas avoir pu empêcher l’empoisonnement de votre père. Il a été un fidèle compagnon de votre grand-père puis de votre père. Même s’il n’a pas approuvé certaines décisions il a toujours été d’excellente compagnie. C’est un homme bon. -
La Princesse et la Rose : Chapitre III
La fête avait été de courte durée, et les invités étaient répartis, inquiets pour le Roi.
Le monarque, allongé dans son lit, n’avais pas repris connaissance depuis qu’il était tombé, huit heures auparavant. À son chevet, son épouse et sa fille étaient mortes d’inquiétude. Valik finissait de l’examiner.
-C’est un empoisonnement, lâcha-t-il. Une forme rare et indétectable de poison. J’en avais déjà entendu parler, mais je n’y avais jamais été confronté.
-Qui a pu faire ça, demanda la Reine. Tout le monde l’aime !
-Je ne sais pas Majesté, répondit Valik. Mais j’avais mis un sort de protection. La personne qui a fait ça utilise une magie très puissante.
Un silence pesant s’installa.
-C’est moi qui était visée, dit soudainement Lisamélie. Père m’avait proposé la coupe. Je l’ai refusée, et il l’a bue à ma place.
-Valik, repris la reine. Votre magie peut-elle soigner mon mari ?
Valik prit un air grave.
-Hélas Majesté, je ne peux rien faire. La magie utilisée est plus forte que la mienne. Votre mari va lentement dépérir. Il succombera d’ici trois mois.
-Il doit bien y avoir une solution, supplia Lisamélie.
Il y en a une seule, répondit Valik. Une rose. Son parfum est le seul antidote.
-Ou peut-on trouver cette rose, questionna la reine.
-C’est une énigme présente dans les livres de magie. Une énigme basée sur la nature. Laissez-moi m’en souvenir.
Il réfléchit un instant.
-Oui, voilà, reprit-il. Au delà les falaises d’or, après le triple tumulte, par delà le feu volant, après les animaux fantastiques et les créatures mystiques, au sommet de la montagne aux cinq cimes, la rose des âmes pousse près de l’abîme. Seul un cœur pur de sang royal, accompagné d’un seul compagnon loyal, pourra cueillir la douce pétale.
-Que signifie ce charabia, demanda la Reine.
-C’est une énigme, mère. Et je m’en vais la résoudre.
-Tu ne peux pas y aller seule, ma fille. Valik, auriez vous l’amabilité d’accompagner ma fille dans cette odyssée ?
-Majesté, répondit Valik. Cela aurait été avec le plus grand honneur, mais la longueur du voyage et mon propre état de santé ne me permet plus de tels prouesses. J’en suis désolé.
-Ce n’est pas grave, mère, reprit Lisamélie. Je sais très bien qui peut m’accompagner dans ce voyage.
-Maximilien, cria la Princesse en entrant dans la serre. Maximilien, où êtes vous?
Maximilien apparut au coin d’une plantation.
-Princesse! Je suis tellement désolé de ce qui est arrivé à votre père !
-Merci Maximilien. Valik m’a parlé d’un antidote. Une rose des âmes.
-Majesté, la rose des âmes est une légende. Elle soignerait de nombreux maux, mais nul n’en a jamais vu.
-Valik m’a noté une énigme présente dans ses livres. Une énigme basée sur la nature. Selon lui, cela permettrait de trouver les fleurs.
Elle lui tendit un papier, qu’il lut attentivement. Il releva la tête.
-La première partie, dit-il. Les falaises d’or. Je pense savoir ce que c’est.
-Accompagnez-moi. Aidez-moi à trouver les fleurs qui sauveront mon père. Valik ne peut pas, il est trop âgé. Et vous connaissez tout des fleurs et de la nature.
Maximilien prit un air songeur puis hocha la tête.
-Très bien Princesse. Je vous accompagne.
-Merci Maximilien, répondit la Princesse, soulagée. Je fais préparer les chevaux.
-Soit bien prudente Lisamélie, dit la Reine en pleurs. Je ne veux pas perdre mon mari et ma fille la même semaine. -
La Princesse et la Rose : Chapitre II
Le lendemain, le royaume s’apprêtait à fêter les dix huit ans de la Princesse Lisamélie. Le château avait été décoré de rubans et de banderoles.
Des invités arrivaient du monde entier.
Dans la grande salle de réception du château, Maximilien le jardinier finissait de fleurir le moindre recoin. La Princesse adorait les fleurs, aussi le Roi souhaitait que le plus grand nombre de fleur soit représenté. Alors qu’il mettait la touche finale à son œuvre, la grande porte s’ouvrit et un grand homme grisonnant entra. C’était Valik le gris, le magicien royal.
-Bonjour Maximilien, dit-il. Comment allons nous aujourd’hui ?
-Bonjour Valik. Je vais bien merci. Je viens de finir la décoration. J’espère que cela plaira à la Princesse. Votre long périple s’est-il bien passé ?
-Oui, mais j’arrête les voyages désormais. Tout ceci n’est plus de mon âge.
-Et que venez-vous faire, mon vieil ami ? Vous ne venez pas enchanter ma décoration j’espère ? La Princesse n’ a plus l’âge pour les nappes dansantes !
-Non, fini la magie pour enfants… Je vais jeter un sortilège de protection sur la pièce, afin d’éviter tout problème pendant la fête.
-Vous pouvez ensorceler une pièce complète ? Vous m’étonnerez toujours. Votre art est vraiment particulier.
-Les sors de protection sont monnaie courante en magie. C’est juste la taille du sort qui varie. Aujourd’hui c’est une vaste pièce que je dois protéger. Mais j’ai déjà fait bien pire.
-Je vous laisse faire alors, répondit Maximilien. Je ne voudrais pas interférer avec votre magie… et vous savez que ça me fait un peu peur ces trucs là !
Il se dirigea vers la grande pièce alors que Valik levait les mains au ciel en fermant les yeux.
-Par tous les Dieux, par tous les Saints, par tous les Démons, passés, présents et futurs, par toutes les magies et les sorcelleries, j’use de tous mes pouvoirs pour protéger cette pièce de toute tentative de malversations et de fourberies…
Maximilien quitta la pièce et n’entendit pas la fin du charme.
La grande salle de réception était pleine de monde. Des princes, Princesse, Rois et Reine du monde entier étaient là. Un peu isolé au bord de la salle, Maximilien regardait tout le beau monde se pavaner.
Un peu partout, d’immenses plateaux étaient posés sur des tables encore plus grandes. La nourriture et les boissons de toutes sortes étaient présents en abondance.
Sur une estrade, au fond de la salle, le Roi, la Reine et la Princesse était debout.
-Merci à vous tous, déclara le Roi. Merci d’être venus si nombreux pour fêter les dix-huit ans de ma fille, Lisamélie. C’est un plaisir que de tous vous revoir. Certains vieux amis sont là, certains anciens ennemis aussi, et c’est un honneur que vous nous faites de venir ainsi nous voir en cette occasion particulière. Il y a aujourd’hui dix huit ans, continua le Roi, naissait ma petite Lisamélie, petit bébé mais avec une voix puissante, si vous voyais ce que je veux dire! La vie de mon épouse et la mienne en furent profondément chamboulées, mais jamais nous n’avons regrettés. Nous avions reçu de nombreux témoignages de sympathie, et de nombreux cadeaux. Le plus beau fut sans doute l’accord de paix signé avec le Roi Éric d’Affiglâle. La naissance de ma fille mettait fin à une guerre de plus de deux cents ans dont nous avions tous oubliés les origines. Encore merci au Roi Éric pour l’intelligence dont il a fait preuve dans sa manière de diriger son royaume et pour ce traité de paix.
Le Roi Éric, présent dans la salle, leva la main et cria:
-Arrête avec tes histoires de vieux, place aux jeunes !
Le roi sourit.
Isolé dans son coin, Maximilien observait tout le monde quand son regard tomba sur Soren, le jeune fils du roi Éric. La manière dont Soren regardait Lisamélie en disait long. Du haut de ses vingt ans, il était sous le charme de la belle princesse.
-Tu as raison Éric, continua le Roi. Comme un signe du destin, notre fille a toujours été un symbole de paix. Un être angélique que rien ne semble énerver. C’est pourquoi nous vous annonçons aujourd’hui que nous comptons prendre notre retraite. Quand nous aurons inauguré le nouveau centre pour les orphelins, dans deux mois, nous organiserons la cérémonie de couronnement de notre fille. Puisse-t-elle régner sur un royaume en paix. Je ne vous embêterais pas plus longtemps, aussi je vous invite à entamer les buffets !
Les gens dans la salle applaudirent puis se dirigèrent vers les tables contenant nourriture et boissons. Le Roi, la Reine et la Princesse descendirent de l’estrade et se dirigèrent également vers les buffets, avec la plus grande difficulté. En effet, ils étaient arrêtés régulièrement pour serrer des mains ou recevoir des félicitations.
La reine s’arrêta pour parler à des amis, alors que le Roi et la Princesse continuèrent leur progression. Quand ils arrivèrent enfin à une des tables, le roi proposa un verre de champagne à sa fille.
-Non merci, papa. Tu sais que je ne bois pas d’alcool.
-Tu n’avais pas le droit d’en boire. Maintenant tu peux !
-J’ai déjà goûté… Je n’aime pas. Je vais plutôt me chercher un jus de fruits.
-Même là tu est raisonnable ma fille. Comme je t’admire.
Il porta la coupe de champagne à la bouche, en bu une gorgée, et tomba au sol, inanimé.
-Papa, hurla Lisamélie.
Les gens autour de lui s’écartèrent. En quelques secondes, Valik le magicien était à ses côtés, et l’examina prestement.
-Il respire, cria-t-il. -
La Princesse et la Rose : Chapitre I
Il était une fois, dans un pays fort lointain, une princesse qui s’appelait Lisamélie. Elle était très jolie, la plus jolie du Royaume. Ses parents, le Roi et la Reine, étaient très fiers d’elle. C’était une jeune fille pleine de joie de vivre et très drôle. Elle passait la plupart de son temps libre à courir dans le château où à vouloir faire des farces aux domestiques.
Mais ce qu’elle adorait par dessus tout, c’était les fleurs. Dans les serres du château, elle allait souvent voir Maximilien, le jardinier Royal. Elle aimait son travail. Il était si doué… Il savait mettre ensemble les fleurs pour rendre le bouquet non seulement beau, mais aussi lui donner une odeur unique, mélange parfait des odeurs de toutes les fleurs du bouquet.
Et pour le jardin du château, le Roi et la Reine lui avaient donné carte blanche : c’était lui qui décidait ce qu’il fallait planter, et où.
Ce jour-là, Lisamélie était entrée silencieusement dans les serres afin de faire une farce à Maximilien. Ce dernier était en train de travailler à son bureau. Lisamélie s’approcha discrètement derrière lui, et au moment où elle allait le chatouiller, il se mit à parler, en continuant de s’occuper de ses plantes.
-Il ne sert à rien d’essayer de me surprendre, votre altesse. Je vous ai senti arriver.
-Comment ça, senti, répliqua la princesse, vexée que sa blague n’ait pas fonctionné. Insinuez-vous que je ne sente pas bon ? J’ai les meilleurs parfums du Royaume !
-Je n’ai pas dit une chose pareille, votre altesse. Et je ne me le permettrait jamais. Je dit juste que vous sentez différemment des fleurs de cette serre.
La princesse réfléchit.
-Vous pouvez savoir qu’une personne est entrée dans votre serre, juste à son odeur ?
-Oui, mademoiselle. C’est un don que j’ai. Je comprends ce que disent les fleurs avec leurs odeurs. De plus, votre parfum est assez rare. Une alliance assez unique de plusieurs senteurs de roses, d’épices rares, d’essences lointaines… Un parfum que seul un Roi peut offrir à sa princesse pour ses dix huit printemps.
La princesse sourit.
-Eaux d’orient, continua Maximilien. Je me trompe ?
-Bien sur que non, répondit Lisamélie en riant. Vous ne vous trompez jamais !
Elle retourna vers la porte des serres, puis se ravisa.
-Serez-vous présent demain pour mon anniversaire ?
-Altesse, un homme comme moi n’est pas présent pour les anniversaires royaux. Je ne ferais que décorer la salle.
-Je vous ferai parvenir une invitation dès cet après-midi. Je veux que vous soyez présent.
Maximilien lui souri.
-Ce sera un grand honneur, princesse.
-Très bien, et mettez-vous sur votre trente et un ! Mon père est très à cheval sur le protocole…
-Bien entendu, répondit le jardinier. Par contre, je ne suis pas sur que donner le parfum en cadeau la veille de l’anniversaire soit très protocolaire…
-Vous lui direz vous-même, lança la princesse en quittant les serres.
-Ou pas, répondit Maximilien, pour lui-même.